Geruzez Jean-Baptiste-François

De Ecole normale de l'an III
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Notice

-- GERUZEZ Jean-Baptiste-François* (Reims, p. Saint Denis, 25 novembre 1763 – Reims, 26 mars 1830), fils d’un commerçant, est nommé par le district de Reims. Ci-devant curé de Sacy, il est alors employé comme prote dans une imprimerie à Reims : « On parla d’école normale, je quittai l’imprimerie pour cette école qui devait me mener au professorat objet unique de mes vues. » (1822)

Ses humanités faites à Reims, il entre le 30 novembre 1784 comme profès à la maison génovéfaine du Val avant d’être envoyé à Lyon (Rhône) où il est ordonné sous-diacre en 1785 puis diacre à Noël de l’année suivante. Lui-même se souvient en 1822 que : « entré à dix sept ans chez les chanoines réguliers de la congrégation de France, j’ai commencé ma carrière par l’instruction, et avant même d’être prêtre, je fus pendant 2 ans chargé dans la maison de Saint-Irénée, à Lyon, de l’instruction de plusieurs jeunes gens à qui je faisais tous les jours des conférences sur l’écriture sainte et que je dirigeais dans leurs études. » Ordonné prêtre à la fête de la Trinité 1788 (17 mai), il est immédiatement chargé de l’instruction des novices à Lyon : « Je me disposais à suivre la carrière de l’instruction, et je devais selon l’usage de ma congrégation être professeur de rhétorique, de philosophie et de théologie ; mais la révolution survint et dérangea toutes mes vues. Un de mes confrères prieur-curé de Belleville à 7 lieues de Lyon m’offrit, avant qu’il fût question de serment, une place de vicaire qui était vacante. Je l’acceptai comme une espèce d’asile ». Assermenté à Reims le 25 septembre 1791 comme vicaire de Saint-Pierre, il exerce ensuite son ministère à Sacy d’où il adresse depuis 1792 au journal La Feuille Villageoise plusieurs lettres relatives à l’éducation. Auteur d’un Projet de bibliothèque pour répandre les lumières dans les campagnes (20 février 1793), il abdique ses fonctions sacerdotales devant la Municipalité de Sacy le 5 ventôse an II – 23 février 1794 (« la violence m’obligea à quitter le ministère » écrira-t-il en 1822) et adresse le lendemain à la Convention nationale une longue lettre : « Conformément à vos décrets, ma Municipalité vous envoie l’abdication de mes fonctions sacerdotales et curiales, que je viens de faire devant elle. C’est un hommage que je devais à la philosophie et que je lui rends très volontiers. Ma conversion philosophique était faite avant qu’il fût utile de la manifester. Il est bien temps qu’à la folie des religions succède la sagesse de la raison ; cette sagesse est encore celle du petit nombre ; la voie qui y conduit est étroite, et il en est peu qui la trouvent ; mais grâce à vos immortels travaux, à votre inébranlable fermeté, cette voie s’élargit de jour en jour. Sans cesse assurés de la tâche de la philosophie, vous abattez infatigablement les épines qui embarrassent la voie de la vérité. Courage législateurs, et bientôt la raison seule s’élèvera majestueusement sur la ruine de tous les préjugés. La philosophie est la vie de l’homme ; c’est la bannière qui éclaire tout homme venant en ce monde ; elle donne à ceux qui l’embrassent, le pouvoir de devenir les enfants de la nature et de la vérité ; législateurs, vous avez reçu de sa plénitude, et son esprit vivifiant est tombé sur vous ; vous avez été envoyés pour la faire adopter à toute créature ; vous abaisserez toute hauteur s’élevant contre elle, et rien ne prévaudra contre vos généreux efforts. […] Je remettrais volontiers à la nation la pension de huit cents livres qu’elle fait aux prêtres abdiquants [sic] ; mais je n’ai ni état ni patrimoine : on ne peut exiger de moi que je me réduise à la mendicité. Mon intention n’est point de demeurer oisif et indépendant. Je suis entré chez un imprimeur : j’ai embrassé cet état d’autant plus volontiers que c’est à lui que nous sommes redevables de la révolution. L’imprimerie est la mère de la raison : c’est elle qui a tué les rois, les nobles et les prêtres. Guerre éternelle à tous les tyrans de l’espèce humaine : paix et fraternité à tous les hommes de bonne volonté, à tous les amis de la sainte égalité. Tel sont les vœux du ci-devant curé de Sacy ». Et d’ajouter en post-scriptum : « Le commerce que je quitte est assez tranquille. Mon absence fait pourtant un vide que l’on remplacera sans doute par un instituteur éclairé. Quelques vieillards voulaient continuer l’office. J’ai représenté tout le ridicule de cette conduite, l’inconvénient de barbouiller du latin que l’on ne comprend point. Je me suis adressé aux plus jeune et j’ai été écouté. Les vieillards se sont bons qu’à maintenir les lois anciennes, les jeunes seuls peuvent contribuer efficacement à l’établissement des nouvelles. […] Avant de quitter ma commune, j’ai tracé un plan court de lectures et de chants patriotiques que l’on m’a promis d’observer les jours de repos. Au reste, j’ai averti de mon abdication la société populaire de Reims, et je l’ai priée de veiller sur les communes sans curés, d’y envoyer des missionnaires philosophes. »

Arrivé à Paris, il intervient aussi bien oralement aux débats de mathématiques (cours de Monge, séance du 26 pluviôse) que par écrit aux leçons sur l’art de la parole de Sicard (19 ventôse). Signataire des pétitions du 2 germinal et du 17 floréal, porteur d’un passeport en date du 26 floréal « en qualité d’élève des Écoles normales ayant intention de retourner à Marne lieu de son domicile », il ne parvient pas à s’employer comme professeur au sein de l’instruction publique : « Je fus trompé dans mon attente. Je ne pus trouver de place. Il y avait un trop petit nombre d’établissements et de professeurs. Après avoir tenu une école à la campagne pendant près de dix huit mois, après avoir été chez un maître particulier [M. Siret] pendant 4 ou 5 mois à Reims, je parvins à obtenir une place de premier commis dans les bureaux de l’instruction publique, ministère de l’intérieur, sous Mr Lacroix mathématicien connu à Paris. » Recommandé pour cet emploi de commis-rédacteur par son ami Pierre-Louis Ginguené alors directeur de l’Instruction publique, il demeure en fonction pendant deux ans dans l’attente d’une opportunité plus ajustée à ses souhaits : « Dans cette position, il me fut plus facile d’obtenir une place de professeur et je fus nommé professeur de logique et de grammaire dans l’école centrale de Beauvais (Oise) ou je professai cinq ans. J’ai ma nomination en bonne forme, 19 vendémiaire an 8 [11 octobre 1799] ». Membre de la Société d’agriculture, commerce, sciences et arts du département de la Marne et de la Société libre des sciences et arts de Paris, il publie un Traité élémentaire de morale, à l’usage des instituteurs des écoles primaires et des pensionnats (Paris, 1799) puis un Discours sur l’origine et les progrès de la langue française (Beauvais, 1800), prononcé en octobre 1800 pour la rentrée de l’École centrale de l’Oise. L’école centrale fermée, il est successivement nommé professeur de quatrième et de troisième (11 fructidor an XII – 29 août 1804) puis professeur de première et de seconde (3 brumaire an XIII – 25 octobre 1804) au Lycée de Reims où il enseigne jusqu’en 1822. Auteur d’une Description historique et statistique de la ville de Reims (Reims, 1817) primée par la Société d’agriculture de la Marne, d’une étude des langues anciennes et de sa propre langue, seul fondement de toute bonne instruction (Reims, 1818) et d’un Mémoire sur le sacre à Reims (Reims, 1819), il demande en 1822 la liquidation de sa pension de retraite faisant valoir la continuité de sa « carrière » au sein de l’instruction publique : « J’ai donc commencé par l’instruction il y a environ 34 ans ; jouet des évènements, j’ai été obligé de la quitter pour le ministère ; j’ai toujours pris les états les plus voisins de l’instruction ; j’y suis revenu deux ou trois fois dans l’intervalle de 7 à 8 ans ; enfin lorsque le gouvernement a pris quelque stabilité, j’y suis resté pour ne plus la quitter. J’ai donc trente trois ou 34 ans de service public, d’abord dans l’instruction puis dans le ministère, dans diverses écoles, dans l’administration de l’instruction, enfin dans les lycées et collèges. » Le Conseil royal de l’Instruction publique lui accorde une pension de professeur d’Université émérite liquidée à 1080 francs. Selon l’abbé E. Bouchez, il se serait conformé le 3 février 1823 aux instructions du Saint-Siège et aurait rétracté par « un désaveu authentique ses erreurs de la période révolutionnaire, ses serments et son intrusion ». Auteur d’un discours Sur l’instruction primaire (Paris, 1824) primé à l’Académie d’Arras en 1820 et un Traité complet des participes (Reims, 1829), il décède célibataire à Reims en 1830.

Sources

[AN – F17*/2181 f. 110 ; F17/20831 ; F17/1431 ; F17/1004B ; F19/880 ; C 338, dossier 1597 ; F17/9558 ; Bibliothèque Sainte-Geneviève – Ms 685 ; AD Marne – 1 J 9 ; Almanach de l’Université, 1812, p.44 ; J. Guillaume, t. VI, p. 106 n.1, 116-117 ; Annuaire ou Almanach du département de la Marne, 1831, p. 317-319 ; P. Dupuy, p. 189-190 ; E. Bouchez, Le clergé du pays rémois pendant la Révolution, Reims, p. 361 ; M.A. Edelstein, La Feuille Villageoise. Communication et modernisation dans les régions rurales, Paris, 1977, p. 75-80 ; DBF, t. 15, col. 1368 ; N. Petit, 2008, notice 2177]