Fontanier Pierre : Différence entre versions

De Ecole normale de l'an III
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<span style="font-variant:small-caps;"> Found a typo? Just edit it.</span><div><div style="padding: 0 1.5em; text-align: justify; width:42%;float:left;margin-left:40px;"><div style="text-align:center;margin-bottom:20px;font-variant:small-caps;">'''Notice'''</div><p><b>-- FONTANIER Pierre*</b> (Moissac, Cantal 2 novembre 1765 – Moissac, Cantal 18 mars 1844), fils de Jean, laboureur, et de Marguerite Glaise, est nommé (vraisemblablement en nivôse an III) par le district de Murat. Il réside alors dans la capitale depuis la fin du mois de mars 1794, date à laquelle il accomplissait une mission, comme commissaire de la Société populaire de Saint-Flour, auprès du Comité des subsistances afin de demander de prompts secours pour le district. Le 18 ventôse an II (8 mars 1794) la Commission d’Instruction publique du département de Paris l’a proposé pour devenir professeur d’histoire, mythologie et géographie dans l’Institut parisien du district de l’Égalité qui reste à créer.</p><p>Fils de l’une de ces familles paysannes originaire de Neussargues où se recrute massivement le clergé de cette région et dont les <i>Mémoires</i> de Marmontel nous ont gardé le souvenir, il entre au grand séminaire de Saint-Flour après des études au collège de la même ville et est ordonné prêtre en 1789. De 1788 à janvier 1791 il est professeur de troisième au collège de Saint-Flour et de cette date à la fermeture du collège au début de 1794 professeur de philosophie. Il prête le serment à la Constitution civile du Clergé le 23 janvier 1791. Dès avril de cette même année il est devenu le vicaire épiscopal d’Anne-Alexandre Thibault, évêque constitutionnel du Cantal. Il appartient vraisemblablement dès 1791 à la Société des Amis de la Constitution de Saint-Flour et en est en 1793 le secrétaire. Lors de la phase de déchristianisation à la Révolution, il donne à tous ses gestes un caractère public prononcé. Le 30 vendémiaire an II (21 octobre 1794), il épouse Marie Artonne administratrice de l’hôpital, ex-religieuse de la congrégation des Sœurs de la Charité de Nevers. Le mariage est célébré en grandes pompes républicaines, d’abord à la mairie en présence de la société populaire, puis à la cathédrale où les époux reçoivent la bénédiction nuptiale d’un vicaire épiscopal qui « annonce au peuple la régénération des mœurs par l’anéantissement des préjugés barbares, enfants de l’orgueil et de la corruption des prêtres ». De la mairie à l’Église, « une foule immense de citoyens et de citoyennes » entonne sur l’air de la Marseillaise l’hymne que Fontanier à lui même composé et dans lequel il invite ses confrères à se déprêtriser : « <i>O vous qu’en des chaînes fatales retiennent des vœux insensés ! Prêtres, cénobites, Vestales, les jours de l’erreur sont passés… </i>» Vingt jours après (20 brumaire an II – 10 novembre 1793) il confirme son choix par une adresse flamboyante à la Convention qui accompagne l’envoi de ses lettres de prêtrise, « <i>ridicules hochets de fanatisme</i> » : il renonce « <i>pour toujours à un ministère d’erreur et de mensonges » pour n’être plus que l’apôtre « de la raison et de la morale publique </i>». Le 17 nivôse an II (6 janvier 1794) il lit à la Société populaire de Saint-Flour une nouvelle abjuration de ce « <i>métier d’imposture et de charlatanisme</i> » : « <i>Périssent les prêtres avec les rois ! Tombent les autels avec les trônes, voilà un vœu</i> ». Il substitue au prénom de Pierre, « <i>nom du chef des tyrans mitrés</i> » celui d’Émile, c’est-à-dire « <i>l’élève de Rousseau, l’enfant de la nature</i> ». Au cours de l’an II, Fontanier est l’un des membres les plus actifs de la Société populaire et fait partie du Comité de surveillance de Saint-Flour. Il exécute avec zèle les ordres du représentant en mission Châteauneuf-Randon étant chargé en particulier de la mission d’aller établir « l’évangile de la raison et de la nature » dans le canton de Pierrefort.</p><p>Ce passé vient le rattraper dès son séjour à l’École normale puisque son adversaire local Pierre Vaissier, ex-bénédictin de Saint-Maur et ex-vicaire épiscopal, lui aussi, de Thibault, devenu à son tour secrétaire de la société populaire fait adopter par celle-ci le 2 germinal an III (22 mars 1795) un texte qui doit être porté à la Convention et qui dénonce « Émile Fontanier, prêtre furibond, l’un des plus zélés exécuteurs des ordres du représentant » Chateauneuf-Randon. Ce dernier n’y répond de manière argumentée qu’à son retour de Saint-Flour. Nous ne connaissons son parcours ultérieur qu’à partir de l’année 1797-1798 où il est maître d’étude au Prytanée français (ex-collège Louis-le-Grand). Il est nommé le 24 germinal an VII (13 avril 1799) professeur de grammaire générale à l’École centrale de l’Ardèche située à Tournon avec la recommandation de François de Neufchâteau ; fonction qu’il exerce jusqu’en juillet 1803. De septembre 1803 à septembre 1806, il dirige une école secondaire particulière dans cette même ville puis, de novembre 1806 jusqu’à la fin de 1809, il est directeur et professeur de lettres latines et françaises au collège de Romans et Bourg-de-Péage. Il est enfin professeur d’humanités au lycée de Besançon à partir du 14 décembre 1809. Son mariage à été réhabilité par le cardinal Caprara en janvier 1806. Son enseignement est suspendu par le Conseil de l’Université en décembre 1814 avec un traitement de non-activité, à la suite des plaintes qui ont été portées sur son passé et son état d’ex-prêtre marié. La Commission royale de l’instruction publique lui donne le 15 octobre 1818 une pension de professeur émérite. D’avril 1819 à janvier 1823 il est, tout en gardant sa pension d’émérite, chargé des fonctions de secrétaire de l’Académie de Rouen. Il est définitivement mis à la retraite le 11 janvier 1823 avec une pension annuelle de 1600 francs, en dépit de son souhait de poursuivre sa charge jusqu’en octobre suivant. L’amertume pointe dans la lettre qu’il adresse le 2 janvier 1823 à Mgr Frayssinous, grand-maître de l’Université depuis juin 1822 : « <i>Ah Monseigneur, j’ai professé la grammaire générale et, sous ce nom, la logique avec la métaphysique, dans un temps où j’eusse bien pu impunément, si j’y eus été porté par mon esprit ou par un cœur, avancer ou imaginer des doctrines funestes. J’ai tous mes cours de ce temps-là en manuscrit dans mes cartons : eh bien ! les examinât-on aujourd’hui avec la dernière rigueur, je suis bien sûr qu’on n’en retrancherait pas une seule phrase tant soit peu suspecte</i> ». Il semble avoir conservé en son for intime les convictions forgées dans le mouvement révolutionnaire comme en témoigne en 1822 sa présentation à l’Académie des Sciences Belles-Lettres et Arts (où il a été reçu en 1820) de l’ouvrage de son compatriote l’abbé Jean Labouderie sur <i>Le Christianisme de Montaigne </i>: il y dénonce dans un passage (qui, finalement, ne sera pas lu publiquement) les atrocités et les abominations qui « sous l’étendard de la croix » ont désolé le monde. Revenu dans son Cantal natal, il écrit pourtant le 9 avril 1826 une lettre de rétractation à Mgr Salomon évêque de Saint-Flour, où il revient sur ses abjurations, ses déclarations ou attitudes contraires à la foi chrétienne.</p><p>Pierre Fontanier est surtout connu pour son œuvre rhétorique : sa nouvelle édition des <i>Tropes</i> de Charles Chesneau Du Marsais avec un commentaire raisonné en 1818, son <i>Manuel classique pour l’étude des tropes</i> (1821), et <i>Des figures autres que des tropes</i> (1827). Redécouvert à la fin des années 1960 par Gérard Genette, il a été considéré comme l’ancêtre de la stylistique moderne. Plus récemment, Françoise Douay lit dans l’œuvre de ce grammairien–sémanticien, « une grammaire des figures de la langue littéraire française des XVII<sup>e</sup> et XVIII<sup>e</sup> siècles » mais ne l’estime pas représentative de la rhétorique de son temps.</p></div><div style="padding: 0 1.5em; text-align: justify; vertical-align:top;margin-right:20px;float:left;width:42%"><div style="font-variant:small-caps;text-align:center;margin-bottom:20px;">'''Sources'''</div><small><p>[AD. Cantal L 28, f° 56r° (23 janvier 1791) et 56 v° (25 janvier 1791) ; L 545, f° 49 ; AN - C 338, dossier 1597 ; F17/1425 ; F17/2494 ; F17/ 20753 ; <i>Archives parlementaires 1</i>ère<i> série</i>, t. 78, p. 269-271, 14 brumaire an II – 4 novembre 1793 (mariage de Pierre Fontanier) ; <i>ibid</i>., t. 79, p 701, 3 frimaire an II – 13 novembre 1793 (abdication) ; <i>Almanach de l’Université</i>, 1812, p.77 ; B. Vinatier, « Un intellectuel dans la Révolution du Cantal : Pierre Fontanier », <i>Revue de la Haute Auvergne</i>, t 52, 1989, p. 181-245 ; <i>id</i>. « Les Cantaliens à l’École normale de l’an III », <i>Revue d’Auvergne</i>, t 105, 1991, p. 334, 337-341 ; A. Vibert, « Fontanier : autour et au-delà de la rhétorique dans le premier tiers du XIX<sup>e</sup> siècle », <i>Revue d’histoire littéraire de la France</i>, vol. 105, 2005, p. 369-393 ; F. Douay, J.-P. Sermain (ed.) « Pierre « Émile » Fontanier », <i>La rhétorique et ses figures de la Révolution à la Restauration</i>, Québec, Presses de l’Université Laval, 2007]</p></small></div></div>
      <span style="font-variant:small-caps;"> Found a typo? Just edit it.</span><div><div style="padding: 0 1.5em; text-align: justify; width:42%;float:left;margin-left:40px;"><div style="text-align:center;margin-bottom:20px;font-variant:small-caps;">'''Notice'''</div><b>-- FONTANIER Pierre*</b> (Moissac, Cantal 2 novembre 1765 – Moissac, Cantal 18 mars 1844), fils de Jean, laboureur, et de Marguerite Glaise, est nommé (vraisemblablement en nivôse an III) par le district de Murat. Il réside alors dans la capitale depuis la fin du mois de mars 1794, date à laquelle il accomplissait une mission, comme commissaire de la Société populaire de Saint-Flour, auprès du Comité des subsistances afin de demander de prompts secours pour le district. Le 18 ventôse an II (8 mars 1794) la Commission d’Instruction publique du département de Paris l’a proposé pour devenir professeur d’histoire, mythologie et géographie dans l’Institut parisien du district de l’Égalité qui reste à créer.Fils de l’une de ces familles paysannes originaire de Neussargues où se recrute massivement le clergé de cette région et dont les <i>Mémoires</i> de Marmontel nous ont gardé le souvenir, il entre au grand séminaire de Saint-Flour après des études au collège de la même ville et est ordonné prêtre en 1789. De 1788 à janvier 1791 il est professeur de troisième au collège de Saint-Flour et de cette date à la fermeture du collège au début de 1794 professeur de philosophie. Il prête le serment à la Constitution civile du Clergé le 23 janvier 1791. Dès avril de cette même année il est devenu le vicaire épiscopal d’Anne-Alexandre Thibault, évêque constitutionnel du Cantal. Il appartient vraisemblablement dès 1791 à la Société des Amis de la Constitution de Saint-Flour et en est en 1793 le secrétaire. Lors de la phase de déchristianisation à la Révolution, il donne à tous ses gestes un caractère public prononcé. Le 30 vendémiaire an II (21 octobre 1794), il épouse Marie Artonne administratrice de l’hôpital, ex-religieuse de la congrégation des Sœurs de la Charité de Nevers. Le mariage est célébré en grandes pompes républicaines, d’abord à la mairie en présence de la société populaire, puis à la cathédrale où les époux reçoivent la bénédiction nuptiale d’un vicaire épiscopal qui « annonce au peuple la régénération des mœurs par l’anéantissement des préjugés barbares, enfants de l’orgueil et de la corruption des prêtres ». De la mairie à l’Église, « une foule immense de citoyens et de citoyennes » entonne sur l’air de la Marseillaise l’hymne que Fontanier à lui même composé et dans lequel il invite ses confrères à se déprêtriser : « <i>O vous qu’en des chaînes fatales retiennent des vœux insensés ! Prêtres, cénobites, Vestales, les jours de l’erreur sont passés… </i>» Vingt jours après (20 brumaire an II – 10 novembre 1793) il confirme son choix par une adresse flamboyante à la Convention qui accompagne l’envoi de ses lettres de prêtrise, « <i>ridicules hochets de fanatisme</i> » : il renonce « <i>pour toujours à un ministère d’erreur et de mensonges » pour n’être plus que l’apôtre « de la raison et de la morale publique </i>». Le 17 nivôse an II (6 janvier 1794) il lit à la Société populaire de Saint-Flour une nouvelle abjuration de ce « <i>métier d’imposture et de charlatanisme</i> » : « <i>Périssent les prêtres avec les rois ! Tombent les autels avec les trônes, voilà un vœu</i> ». Il substitue au prénom de Pierre, « <i>nom du chef des tyrans mitrés</i> » celui d’Émile, c’est-à-dire « <i>l’élève de Rousseau, l’enfant de la nature</i> ». Au cours de l’an II, Fontanier est l’un des membres les plus actifs de la Société populaire et fait partie du Comité de surveillance de Saint-Flour. Il exécute avec zèle les ordres du représentant en mission Châteauneuf-Randon étant chargé en particulier de la mission d’aller établir « l’évangile de la raison et de la nature » dans le canton de Pierrefort.Ce passé vient le rattraper dès son séjour à l’École normale puisque son adversaire local Pierre Vaissier, ex-bénédictin de Saint-Maur et ex-vicaire épiscopal, lui aussi, de Thibault, devenu à son tour secrétaire de la société populaire fait adopter par celle-ci le 2 germinal an III (22 mars 1795) un texte qui doit être porté à la Convention et qui dénonce « Émile Fontanier, prêtre furibond, l’un des plus zélés exécuteurs des ordres du représentant » Chateauneuf-Randon. Ce dernier n’y répond de manière argumentée qu’à son retour de Saint-Flour. Nous ne connaissons son parcours ultérieur qu’à partir de l’année 1797-1798 où il est maître d’étude au Prytanée français (ex-collège Louis-le-Grand). Il est nommé le 24 germinal an VII (13 avril 1799) professeur de grammaire générale à l’École centrale de l’Ardèche située à Tournon avec la recommandation de François de Neufchâteau ; fonction qu’il exerce jusqu’en juillet 1803. De septembre 1803 à septembre 1806, il dirige une école secondaire particulière dans cette même ville puis, de novembre 1806 jusqu’à la fin de 1809, il est directeur et professeur de lettres latines et françaises au collège de Romans et Bourg-de-Péage. Il est enfin professeur d’humanités au lycée de Besançon à partir du 14 décembre 1809. Son mariage à été réhabilité par le cardinal Caprara en janvier 1806. Son enseignement est suspendu par le Conseil de l’Université en décembre 1814 avec un traitement de non-activité, à la suite des plaintes qui ont été portées sur son passé et son état d’ex-prêtre marié. La Commission royale de l’instruction publique lui donne le 15 octobre 1818 une pension de professeur émérite. D’avril 1819 à janvier 1823 il est, tout en gardant sa pension d’émérite, chargé des fonctions de secrétaire de l’Académie de Rouen. Il est définitivement mis à la retraite le 11 janvier 1823 avec une pension annuelle de 1600 francs, en dépit de son souhait de poursuivre sa charge jusqu’en octobre suivant. L’amertume pointe dans la lettre qu’il adresse le 2 janvier 1823 à Mgr Frayssinous, grand-maître de l’Université depuis juin 1822 : « <i>Ah Monseigneur, j’ai professé la grammaire générale et, sous ce nom, la logique avec la métaphysique, dans un temps où j’eusse bien pu impunément, si j’y eus été porté par mon esprit ou par un cœur, avancer ou imaginer des doctrines funestes. J’ai tous mes cours de ce temps-là en manuscrit dans mes cartons : eh bien ! les examinât-on aujourd’hui avec la dernière rigueur, je suis bien sûr qu’on n’en retrancherait pas une seule phrase tant soit peu suspecte</i> ». Il semble avoir conservé en son for intime les convictions forgées dans le mouvement révolutionnaire comme en témoigne en 1822 sa présentation à l’Académie des Sciences Belles-Lettres et Arts (où il a été reçu en 1820) de l’ouvrage de son compatriote l’abbé Jean Labouderie sur <i>Le Christianisme de Montaigne </i>: il y dénonce dans un passage (qui, finalement, ne sera pas lu publiquement) les atrocités et les abominations qui « sous l’étendard de la croix » ont désolé le monde. Revenu dans son Cantal natal, il écrit pourtant le 9 avril 1826 une lettre de rétractation à Mgr Salomon évêque de Saint-Flour, où il revient sur ses abjurations, ses déclarations ou attitudes contraires à la foi chrétienne.Pierre Fontanier est surtout connu pour son œuvre rhétorique : sa nouvelle édition des <i>Tropes</i> de Charles Chesneau Du Marsais avec un commentaire raisonné en 1818, son <i>Manuel classique pour l’étude des tropes</i> (1821), et <i>Des figures autres que des tropes</i> (1827). Redécouvert à la fin des années 1960 par Gérard Genette, il a été considéré comme l’ancêtre de la stylistique moderne. Plus récemment, Françoise Douay lit dans l’œuvre de ce grammairien–sémanticien, « une grammaire des figures de la langue littéraire française des XVII<sup>e</sup> et XVIII<sup>e</sup> siècles » mais ne l’estime pas représentative de la rhétorique de son temps.</div><div style="padding: 0 1.5em; text-align: justify; vertical-align:top;margin-right:20px;float:left;width:42%"><div style="font-variant:small-caps;text-align:center;margin-bottom:20px;">'''Sources'''</div><small>[AD. Cantal L 28, f° 56r° (23 janvier 1791) et 56 v° (25 janvier 1791) ; L 545, f° 49 ; AN - C 338, dossier 1597 ; F17/1425 ; F17/2494 ; F17/ 20753 ; <i>Archives parlementaires 1</i>ère<i> série</i>, t. 78, p. 269-271, 14 brumaire an II – 4 novembre 1793 (mariage de Pierre Fontanier) ; <i>ibid</i>., t. 79, p 701, 3 frimaire an II – 13 novembre 1793 (abdication) ; <i>Almanach de l’Université</i>, 1812, p.77 ; B. Vinatier, « Un intellectuel dans la Révolution du Cantal : Pierre Fontanier », <i>Revue de la Haute Auvergne</i>, t 52, 1989, p. 181-245 ; <i>id</i>. « Les Cantaliens à l’École normale de l’an III », <i>Revue d’Auvergne</i>, t 105, 1991, p. 334, 337-341 ; A. Vibert, « Fontanier : autour et au-delà de la rhétorique dans le premier tiers du XIX<sup>e</sup> siècle », <i>Revue d’histoire littéraire de la France</i>, vol. 105, 2005, p. 369-393 ; F. Douay, J.-P. Sermain (ed.) « Pierre « Émile » Fontanier », <i>La rhétorique et ses figures de la Révolution à la Restauration</i>, Québec, Presses de l’Université Laval, 2007]</small></div></div>
 

Version du 27 mars 2016 à 01:55

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Notice

-- FONTANIER Pierre* (Moissac, Cantal 2 novembre 1765 – Moissac, Cantal 18 mars 1844), fils de Jean, laboureur, et de Marguerite Glaise, est nommé (vraisemblablement en nivôse an III) par le district de Murat. Il réside alors dans la capitale depuis la fin du mois de mars 1794, date à laquelle il accomplissait une mission, comme commissaire de la Société populaire de Saint-Flour, auprès du Comité des subsistances afin de demander de prompts secours pour le district. Le 18 ventôse an II (8 mars 1794) la Commission d’Instruction publique du département de Paris l’a proposé pour devenir professeur d’histoire, mythologie et géographie dans l’Institut parisien du district de l’Égalité qui reste à créer.

Fils de l’une de ces familles paysannes originaire de Neussargues où se recrute massivement le clergé de cette région et dont les Mémoires de Marmontel nous ont gardé le souvenir, il entre au grand séminaire de Saint-Flour après des études au collège de la même ville et est ordonné prêtre en 1789. De 1788 à janvier 1791 il est professeur de troisième au collège de Saint-Flour et de cette date à la fermeture du collège au début de 1794 professeur de philosophie. Il prête le serment à la Constitution civile du Clergé le 23 janvier 1791. Dès avril de cette même année il est devenu le vicaire épiscopal d’Anne-Alexandre Thibault, évêque constitutionnel du Cantal. Il appartient vraisemblablement dès 1791 à la Société des Amis de la Constitution de Saint-Flour et en est en 1793 le secrétaire. Lors de la phase de déchristianisation à la Révolution, il donne à tous ses gestes un caractère public prononcé. Le 30 vendémiaire an II (21 octobre 1794), il épouse Marie Artonne administratrice de l’hôpital, ex-religieuse de la congrégation des Sœurs de la Charité de Nevers. Le mariage est célébré en grandes pompes républicaines, d’abord à la mairie en présence de la société populaire, puis à la cathédrale où les époux reçoivent la bénédiction nuptiale d’un vicaire épiscopal qui « annonce au peuple la régénération des mœurs par l’anéantissement des préjugés barbares, enfants de l’orgueil et de la corruption des prêtres ». De la mairie à l’Église, « une foule immense de citoyens et de citoyennes » entonne sur l’air de la Marseillaise l’hymne que Fontanier à lui même composé et dans lequel il invite ses confrères à se déprêtriser : « O vous qu’en des chaînes fatales retiennent des vœux insensés ! Prêtres, cénobites, Vestales, les jours de l’erreur sont passés… » Vingt jours après (20 brumaire an II – 10 novembre 1793) il confirme son choix par une adresse flamboyante à la Convention qui accompagne l’envoi de ses lettres de prêtrise, « ridicules hochets de fanatisme » : il renonce « pour toujours à un ministère d’erreur et de mensonges » pour n’être plus que l’apôtre « de la raison et de la morale publique ». Le 17 nivôse an II (6 janvier 1794) il lit à la Société populaire de Saint-Flour une nouvelle abjuration de ce « métier d’imposture et de charlatanisme » : « Périssent les prêtres avec les rois ! Tombent les autels avec les trônes, voilà un vœu ». Il substitue au prénom de Pierre, « nom du chef des tyrans mitrés » celui d’Émile, c’est-à-dire « l’élève de Rousseau, l’enfant de la nature ». Au cours de l’an II, Fontanier est l’un des membres les plus actifs de la Société populaire et fait partie du Comité de surveillance de Saint-Flour. Il exécute avec zèle les ordres du représentant en mission Châteauneuf-Randon étant chargé en particulier de la mission d’aller établir « l’évangile de la raison et de la nature » dans le canton de Pierrefort.

Ce passé vient le rattraper dès son séjour à l’École normale puisque son adversaire local Pierre Vaissier, ex-bénédictin de Saint-Maur et ex-vicaire épiscopal, lui aussi, de Thibault, devenu à son tour secrétaire de la société populaire fait adopter par celle-ci le 2 germinal an III (22 mars 1795) un texte qui doit être porté à la Convention et qui dénonce « Émile Fontanier, prêtre furibond, l’un des plus zélés exécuteurs des ordres du représentant » Chateauneuf-Randon. Ce dernier n’y répond de manière argumentée qu’à son retour de Saint-Flour. Nous ne connaissons son parcours ultérieur qu’à partir de l’année 1797-1798 où il est maître d’étude au Prytanée français (ex-collège Louis-le-Grand). Il est nommé le 24 germinal an VII (13 avril 1799) professeur de grammaire générale à l’École centrale de l’Ardèche située à Tournon avec la recommandation de François de Neufchâteau ; fonction qu’il exerce jusqu’en juillet 1803. De septembre 1803 à septembre 1806, il dirige une école secondaire particulière dans cette même ville puis, de novembre 1806 jusqu’à la fin de 1809, il est directeur et professeur de lettres latines et françaises au collège de Romans et Bourg-de-Péage. Il est enfin professeur d’humanités au lycée de Besançon à partir du 14 décembre 1809. Son mariage à été réhabilité par le cardinal Caprara en janvier 1806. Son enseignement est suspendu par le Conseil de l’Université en décembre 1814 avec un traitement de non-activité, à la suite des plaintes qui ont été portées sur son passé et son état d’ex-prêtre marié. La Commission royale de l’instruction publique lui donne le 15 octobre 1818 une pension de professeur émérite. D’avril 1819 à janvier 1823 il est, tout en gardant sa pension d’émérite, chargé des fonctions de secrétaire de l’Académie de Rouen. Il est définitivement mis à la retraite le 11 janvier 1823 avec une pension annuelle de 1600 francs, en dépit de son souhait de poursuivre sa charge jusqu’en octobre suivant. L’amertume pointe dans la lettre qu’il adresse le 2 janvier 1823 à Mgr Frayssinous, grand-maître de l’Université depuis juin 1822 : « Ah Monseigneur, j’ai professé la grammaire générale et, sous ce nom, la logique avec la métaphysique, dans un temps où j’eusse bien pu impunément, si j’y eus été porté par mon esprit ou par un cœur, avancer ou imaginer des doctrines funestes. J’ai tous mes cours de ce temps-là en manuscrit dans mes cartons : eh bien ! les examinât-on aujourd’hui avec la dernière rigueur, je suis bien sûr qu’on n’en retrancherait pas une seule phrase tant soit peu suspecte ». Il semble avoir conservé en son for intime les convictions forgées dans le mouvement révolutionnaire comme en témoigne en 1822 sa présentation à l’Académie des Sciences Belles-Lettres et Arts (où il a été reçu en 1820) de l’ouvrage de son compatriote l’abbé Jean Labouderie sur Le Christianisme de Montaigne : il y dénonce dans un passage (qui, finalement, ne sera pas lu publiquement) les atrocités et les abominations qui « sous l’étendard de la croix » ont désolé le monde. Revenu dans son Cantal natal, il écrit pourtant le 9 avril 1826 une lettre de rétractation à Mgr Salomon évêque de Saint-Flour, où il revient sur ses abjurations, ses déclarations ou attitudes contraires à la foi chrétienne.

Pierre Fontanier est surtout connu pour son œuvre rhétorique : sa nouvelle édition des Tropes de Charles Chesneau Du Marsais avec un commentaire raisonné en 1818, son Manuel classique pour l’étude des tropes (1821), et Des figures autres que des tropes (1827). Redécouvert à la fin des années 1960 par Gérard Genette, il a été considéré comme l’ancêtre de la stylistique moderne. Plus récemment, Françoise Douay lit dans l’œuvre de ce grammairien–sémanticien, « une grammaire des figures de la langue littéraire française des XVIIe et XVIIIe siècles » mais ne l’estime pas représentative de la rhétorique de son temps.

Sources

[AD. Cantal L 28, f° 56r° (23 janvier 1791) et 56 v° (25 janvier 1791) ; L 545, f° 49 ; AN - C 338, dossier 1597 ; F17/1425 ; F17/2494 ; F17/ 20753 ; Archives parlementaires 1ère série, t. 78, p. 269-271, 14 brumaire an II – 4 novembre 1793 (mariage de Pierre Fontanier) ; ibid., t. 79, p 701, 3 frimaire an II – 13 novembre 1793 (abdication) ; Almanach de l’Université, 1812, p.77 ; B. Vinatier, « Un intellectuel dans la Révolution du Cantal : Pierre Fontanier », Revue de la Haute Auvergne, t 52, 1989, p. 181-245 ; id. « Les Cantaliens à l’École normale de l’an III », Revue d’Auvergne, t 105, 1991, p. 334, 337-341 ; A. Vibert, « Fontanier : autour et au-delà de la rhétorique dans le premier tiers du XIXe siècle », Revue d’histoire littéraire de la France, vol. 105, 2005, p. 369-393 ; F. Douay, J.-P. Sermain (ed.) « Pierre « Émile » Fontanier », La rhétorique et ses figures de la Révolution à la Restauration, Québec, Presses de l’Université Laval, 2007]